Une découverte spectaculaire sur l’île Livingston apporte un nouvel éclairage sur la végétation préhistorique de l’Antarctique. Escuderia livingstonensis, une fougère jusqu’alors inconnue, est le premier fossile perminéralisé de l’ordre des Schizaeales jamais décrit sur le continent austral. Cette découverte montre que l’Antarctique, durant le Crétacé, n’était pas recouvert de glace, mais d’une végétation luxuriante.
Le paléobiologiste Marcelo Leppe Cartes du centre GEMA de l’Universidad Mayor parle d’une «pièce clé» dans l’histoire de l’évolution des plantes. «L’anatomie est exceptionnellement bien conservée. Elle nous permet de comparer directement le fossile avec des espèces actuelles et de réaliser ainsi de nouvelles analyses phylogénétiques.»
Le matériel avait déjà été collecté en 2011 lors d’une expédition antarctique de l’Institut chilien antarctique INACH. Des années plus tard, une équipe internationale du Chili et du Japon a réexaminé les échantillons. Grâce aux techniques les plus modernes, comme les reconstructions 3D et la microscopie haute résolution, il a finalement été possible d’analyser en détail cette fougère.
La fougère présente plusieurs particularités anatomiques: un ramification sympodiale des axes fertiles, des structures particulières de sporanges ainsi que des spores du type Ischyosporites. Ces caractéristiques ne correspondent à aucune lignée de fougères actuelle ou fossile — une indication que l’Antarctique fut autrefois un centre de diversité évolutive.
Une fenêtre sur une «Antarctique verte»
Cette découverte s’inscrit dans un puzzle plus vaste: dans le même sol préhistorique, les chercheurs ont trouvé d’autres restes végétaux — notamment des organes reproducteurs de gymnospermes, des pousses de conifères et des racines avec mycorhizes. Cette diversité dessine l’image d’un écosystème complexe et abondamment végétalisé au cœur de ce qui est aujourd’hui un désert de glace.
L’équipe de recherche a déjà réalisé une reconstruction 3D de la fougère. Des études comparatives avec des fossiles du Japon et d’Amérique du Sud sont désormais prévues. Les technologies modernes, comme la tomographie aux rayons X non destructive, pourraient réserver d’autres surprises.
Rosamaria Kubny, PolarJournal

