La Norvège suspend l’exploitation minière des grands fonds marins jusqu’en 2029

par Lisa Scherk
12/05/2025

La Norvège a décidé de suspendre au moins jusqu’en 2029 ses projets d’exploitation minière des fonds marins dans les eaux arctiques. Cette décision, annoncée le 1er décembre 2025, fait partie d’un compromis politique lié au budget de l’État pour 2026. Aucun nouveau permis ne sera délivré durant l’actuelle législature, et le financement public destiné à la cartographie des minéraux des fonds marins sera réduit.
Cette pause marque un net recul par rapport aux plans précédents visant à ouvrir 280 000 km² du plateau continental norvégien à des activités minières – une superficie presque équivalente à celle de l’Italie. Les fonds marins sont estimés contenir 38 millions de tonnes de cuivre, 45 millions de tonnes de zinc et des quantités importantes de terres rares essentielles aux technologies renouvelables. Les travaux devaient initialement commencer vers 2030, mais le moratoire repousse ce calendrier d’au moins quatre ans.

La science salue un délai pour la recherche
Les institutions scientifiques norvégiennes ont accueilli favorablement le moratoire, soulignant qu’il offre un temps crucial pour combler les lacunes dans les connaissances. L’Institut norvégien de recherche marine a réaffirmé qu’il faudrait encore cinq à dix ans de recherche avant de pouvoir prendre des décisions responsables. Des chercheurs de l’Université de Bergen (Centre de recherche sur les grands fonds marins) et de l’Université de Stavanger soulignent que des études supplémentaires sont nécessaires pour comprendre les effets potentiels sur les sources hydrothermales, les panaches de sédiments et la biodiversité.
Les scientifiques insistent sur le fait que les années à venir doivent servir à établir des bases environnementales solides et des cadres de surveillance afin que toute activité future repose sur des données scientifiques fiables.

L’industrie voit des risques pour la transition énergétique
Les représentants de l’industrie considèrent la décision comme un revers pour le rôle de la Norvège dans la compétition mondiale pour les matières premières critiques. Les entreprises affirment que la pause pourrait retarder l’accès à des ressources indispensables à la transition énergétique – notamment le cuivre, le zinc et les terres rares utilisés dans les batteries, les éoliennes et les véhicules électriques.
Anette Broch, PDG de la start-up bergenoise Adepth Minerals, a qualifié le moratoire de « décevant, mais pas alarmant », soulignant que l’exploitation minière des grands fonds demeure essentielle pour réduire la dépendance vis-à-vis des mines terrestres et sécuriser les chaînes d’approvisionnement. L’Agence internationale de l’énergie estime que la demande de minéraux comme le cuivre et le nickel pourrait doubler d’ici 2040 – un facteur qui renforce l’urgence du débat.

Les organisations environnementales célèbrent la décision
Des ONG telles que WWF et Greenpeace saluent le moratoire comme une « victoire historique pour la nature ». Elles soulignent que les recommandations scientifiques et la pression publique ont joué un rôle clé et demandent désormais à la Norvège de soutenir une interdiction mondiale de l’exploitation minière des grands fonds.

Les Samis et les communautés arctiques réclament une participation réelle
Les représentants samis et d’autres communautés arctiques voient dans cette pause un pas dans la bonne direction, mais insistent pour que les décisions futures reposent sur une consultation authentique. Ils s’inquiètent des impacts potentiels sur les moyens de subsistance traditionnels, comme la pêche et l’élevage de rennes, ainsi que sur le patrimoine culturel.
Ailo Gaup, porte-parole de la commission environnementale du Parlement sami, a déclaré :
« L’Arctique est notre foyer. Même des perturbations temporaires des écosystèmes marins peuvent affecter les zones de pêche et le paysage culturel. Nous saluons cette pause, mais rappelons que les voix autochtones doivent guider les décisions futures. »

Le Parlement européen et la perspective internationale
Le Parlement européen suit attentivement les développements de l’exploitation minière des fonds marins et insiste sur la nécessité de mesures de protection de l’environnement et d’une coopération internationale renforcée. Dans de récentes résolutions, les députés appellent à une approche de précaution concernant l’extraction de ressources marines et rappellent l’importance de protéger la biodiversité, de lutter contre le changement climatique et de respecter les droits des peuples autochtones.
Un porte-parole du Parlement européen a commenté :
« La décision de la Norvège de mettre en pause l’exploitation minière des grands fonds est en ligne avec les priorités de l’UE en matière de protection des écosystèmes marins et de développement de chaînes d’approvisionnement durables pour les matières premières critiques. »

Perspectives
Le moratoire met en lumière un dilemme mondial : comment sécuriser les minéraux nécessaires à la transition énergétique sans mettre en péril les écosystèmes océaniques ? Les quatre prochaines années pourraient être déterminantes pour la recherche, la régulation et les alternatives durables telles que le recyclage ou une exploitation terrestre mieux encadrée.
Les années à venir montreront si les progrès technologiques peuvent s’accorder avec la préservation d’écosystèmes marins fragiles – un test de notre capacité à concilier la demande urgente en minéraux critiques et les risques encore largement inconnus de la perturbation des grands fonds.

Lisa Scherk, PolarJournal

Veuillez noter que le texte original a été rédigé en anglais et en allemand et que la présente version n’est qu’une traduction.