Rétrospective polaire – Projet scientifique citoyen réussi en Antarctique, toxines arctiques et volcans en éruption

par Polar Journal AG Team
07/14/2025

La rétrospective polaire se penche sur les événements récents survenus dans les régions polaires du monde. Cette semaine, nous examinons l’impact d’un projet scientifique citoyen soutenu par la NASA en Antarctique, l’augmentation des niveaux de toxines dans l’Arctique alaskien et la fonte des glaciers qui pourrait déclencher d’autres éruptions volcaniques

Baleine boréale vue du ciel. Image : Caila Kucheravy

La rétrospective polaire est un effort de collaboration de l’équipe éditoriale de polarjournal.net. Chaque rédacteur choisit un sujet qu’il a trouvé intéressant et important au cours de la semaine écoulée. Les initiales à la fin de chaque section indiquent l’auteur.

Le projet de science citoyenne en Antarctique soutenu par la NASA est un succès retentissant

Scientifiques et touristes travaillent ensemble avec succès à FjordPhyto. Photo : Rutger Bauer via IAATO

La frontière entre le touriste et le scientifique s’estompe en Antarctique, grâce au projet FjordPhyto soutenu par la NASA. Cette initiative innovante de science citoyenne fait appel à des voyageurs qui participent à des croisières d’expédition pour aider les chercheurs à comprendre l’impact de la fonte des glaciers sur les populations vitales de phytoplancton de la région.

Une étude récente évaluant les deux premières années du projet a révélé son profond succès. L’étude, publiée dans Polar Research, a révélé qu’un pourcentage écrasant de 97 % des participants ont estimé que leur participation à FjordPhyto avait enrichi leur expérience de voyage. En collectant des échantillons d’eau et en enregistrant des données, les touristes acquièrent une compréhension pratique de la recherche scientifique qui est fondamentale pour l’identité de l’Antarctique.

FjordPhyto, une collaboration entre des scientifiques de la Scripps Institution of Oceanography, de l’Universidad Nacional De La Plata et de divers voyagistes, fournit un flux crucial de données provenant de fjords éloignés qu’il serait autrement difficile de surveiller. Le projet permet non seulement d’élargir les connaissances scientifiques, mais aussi de renforcer les liens avec le continent. Comme l’a exprimé un participant, il lui a donné l’impression « d’être moins un simple visiteur et de participer davantage au maintien de la culture scientifique qui fait la réputation de l’Antarctique ».

Cette fusion réussie du tourisme et de la recherche démontre l’impact de la science citoyenne. Elle responsabilise les individus, transformant un voyage sur le continent blanc en une contribution significative à la compréhension du public et à la préservation de cet écosystème fragile et crucial. M.W.

Des toxines détectées chez les baleines de l’Arctique

Les baleines boréales étudiées se nourrissent près d’Utqiaġvik, à des profondeurs allant du plateau continental (45 m) aux eaux plus profondes (plus de 300 m) du canyon Barrow. Image : NOAA Fisheries

Publiée en juin 2025 dans la revue Nature, une étude met en évidence une augmentation significative des toxines algales dans l’Arctique, directement liée au réchauffement des océans. Ce résultat a été obtenu en analysant 205 échantillons de fèces de baleines boréales collectés entre 2004 et 2022 lors de chasses de subsistance menées par des communautés indigènes en Alaska.

L’équipe de chercheurs a détecté deux neurotoxines marines : la saxitoxine, produite par le dinoflagellé Alexandrium catenella, et l’acide domoïque, produit par des diatomées du genre Pseudo-nitzschia.

Ces toxines prolifèrent sous les effets combinés de la hausse des températures, de la fonte précoce de la glace de mer, de l’augmentation des zones d’eau libre et des changements dans les vents et les courants océaniques. Les « banques de kystes » d’A. catenella dans les sédiments de la mer de Beaufort sont réactivées par le réchauffement, tandis que les cellules toxiques sont également transportées depuis la mer de Béring.

Les baleines, qui filtrent le zooplancton contaminé pour se nourrir, accumulent ces toxines dans leur système digestif. Bien que les concentrations trouvées dans leurs excréments soient encore faibles, les chercheurs n’excluent pas la possibilité d’une accumulation dans la chair ou les organes consommés par l’homme. Cela représente un risque croissant pour la sécurité alimentaire des populations de l’Arctique qui dépendent de la faune marine. Les auteurs appellent à une vigilance accrue vis-à-vis de ces toxines dans la chaîne alimentaire. C.L.

La fonte des glaciers pourrait réveiller des volcans endormis, alertent des scientifiques

Le volcan Mocho-Choshuenco, dans les Andes chiliennes. Il est composé de deux volcans jumeaux et culmine, à son point le plus élevé, 2422 mètres. Sa dernière éruption remonte à 1936. Photo : Dropus, Wikicommons

L’accélération de la fonte des glaciers liée au changement climatique pourrait entraîner des éruptions volcaniques plus fréquentes et plus explosives, selon une étude présentée la semaine dernière à la conférence Goldschmidt à Prague.

Menée par une équipe de l’Université du Wisconsin-Madison, leur recherche, dont les résultats ont été publiés le mois dernier dans le GSA Bulletin, s’est concentrée sur six volcans de la cordillère des Andes chilienne, dont le Mocho-Choshuenco, aujourd’hui inactif. En datant d’anciennes éruptions et en analysant la structure des cristaux présents dans les roches volcaniques, les chercheurs ont découvert que les épais glaciers de la dernière période glaciaire avaient freiné l’activité volcanique, jusqu’à ce que la fonte rapide des glaces libère la pression accumulée, provoquant des éruptions explosives.

Le poids de la glace agit comme un couvercle, maintenant la pression du magma sous contrôle. Mais lorsque les glaciers reculent, cette pression se relâche, les gaz s’expandent et des éruptions violentes peuvent se produire. Ce phénomène est bien documenté en Islande, où une hausse de l’activité volcanique a déjà été observée. Selon l’étude, il pourrait aussi concerner des régions continentales comme l’Amérique du Nord, la Nouvelle-Zélande, la Russie ou encore l’Antarctique. D’où l’urgence, selon les auteurs, d’intensifier la surveillance des volcans situés sous les glaciers.

Au-delà du risque géologique, l’étude met en garde contre un effet de rétroaction climatique. Une éruption isolée peut temporairement refroidir la planète, comme ce fut le cas après l’éruption du Pinatubo en 1991. Mais des éruptions multiples pourraient, à long terme, libérer d’importantes quantités de gaz à effet de serre, aggravant ainsi le réchauffement global. M.B.