Alors que la banquise arctique continue de reculer, de nouvelles routes maritimes s’ouvrent, offrant des temps de transit potentiellement plus courts et de nouvelles opportunités économiques. Avec les prévisions d’un été arctique sans glace de mer dès 2030, la route maritime du Nord devient de plus en plus une réalité pour le commerce international.
Les pays s’efforcent de tirer parti de cette situation, mais aucun d’entre eux n’affiche une approche plus contradictoire que la Chine. D’un côté, les scientifiques chinois lancent des avertissements terribles et réclament des réglementations strictes ; de l’autre, les compagnies maritimes chinoises développent agressivement leurs activités dans l’Arctique, créant un paradoxe frappant qui pourrait définir l’avenir de la fragile région polaire.
Les Chinois réclament davantage de réglementations pour le transport maritime dans l’Arctique
Dans une lettre publiée dans la revue Science, un groupe de chercheurs chinois lance un appel urgent à l’action. Ils soulignent que les navires qui empruntent ces nouvelles voies rejettent du carbone noir, ce qui accélère la fonte des glaces. Cela crée une dangereuse boucle de rétroaction : moins il y a de glace, plus il y a de navires, ce qui entraîne à son tour une diminution de la glace. Les scientifiques affirment que les réglementations internationales actuelles, telles que le code polaire et l’indice d’intensité carbone de l’Organisation maritime internationale, sont inadéquates, car elles ne prévoient pas de normes d’émission obligatoires et ne tiennent pas compte de la vulnérabilité unique de l’environnement polaire. La solution qu’ils proposent est une convention globale et juridiquement contraignante sur le transport maritime dans l’Arctique, qui devrait être établie lors de la prochaine conférence sur le climat COP30. Cette convention fixerait des normes environnementales claires, imposerait des technologies écologiques pour les navires et établirait un organe de gouvernance transnational chargé de gérer les itinéraires.
Pourtant, alors que la communauté scientifique chinoise appelle à la prudence, ses entreprises commerciales vont de l’avant. La compagnie maritime chinoise Yangpu Newnew Shipping Co. a reçu l’autorisation de faire transiter plusieurs porte-conteneurs par la route maritime du Nord de la Russie cet été. Notamment, des navires tels que le NewNew Panda 1, d’une capacité de 4 363 EVP (NDLR : 1 EVP = 1 équivalent conteneur de 20 pieds), ne sont pas classés dans la catégorie des glaces, ce qui témoigne de l’accessibilité de la route pendant les mois d’été. La compagnie, qui a commencé sa « Route Express Arctique » en 2023, prévoit une expansion importante. Elle a notamment passé commande de cinq nouveaux porte-conteneurs Arc7 de classe glace, capables d’opérer dans l’Arctique pendant la majeure partie de l’année avec l’assistance d’un brise-glace.
Le paradoxe arctique de la Chine
C’est là que réside le paradoxe. Le développement du transport maritime dans l’Arctique répond à une logique économique claire. Un voyage de la péninsule russe de Yamal à la Chine via l’Arctique peut être effectué en moins de 20 jours, soit environ la moitié du temps nécessaire pour emprunter la route traditionnelle du canal de Suez. La Chine est déjà une destination majeure pour le GNL russe expédié par cette voie, puisqu’elle recevra 35 livraisons du projet Yamal LNG rien qu’en 2024. Ce désir d’une route commerciale plus rapide et moins chère est en contradiction directe avec les mises en garde environnementales émanant de ses propres experts. L’expansion du transport maritime contribue non seulement à la fonte des glaces, mais stimule également l’exploitation des ressources dans l’Arctique, ce qui pourrait libérer de grandes quantités de méthane provenant du dégel du pergélisol.
Les approches divergentes des secteurs scientifiques et commerciaux de Pékin mettent en évidence un défi de taille. Le désir d’une route maritime plus efficace et plus économique est un puissant moteur de l’expansion commerciale dans l’Arctique. Cette volonté s’oppose directement aux appels scientifiques en faveur d’une réglementation accrue pour protéger un écosystème vulnérable. La manière dont la Chine équilibrera ces intérêts divergents sera déterminante pour la gouvernance future et la santé environnementale de la région arctique.
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